Le Swastika, peut-on ignorer son sens religieux ?

La façon dont un porte-bonheur au départ si positif et noble (dans le sens premier du terme) en a pu arriver à représenter l'oppression tyrannique et le génocide est peut-être l'un des plus grands paradoxes de l'histoire du monde.

C’est précisément cette problématique que l’article que vous êtes en train de lire va soulever.

Ensemble, nous allons essayer de comprendre pourquoi il faut (ou non) détester le swastika dans son essence. Plus largement, nous essayerons de répondre à cette question : « Le swastika, peut-on ignorer son sens religieux ? »

Pour ce faire, nous allons nous intéresser plus en profondeur aux origines de cette croix indienne, à son histoire et aux différentes significations qu’elle a pu prendre au cours de l’histoire.

Table des matières :

Préambule

Des traces du swastika partout dans le monde

Le swastika dans l’Hindouisme…

…et dans le Bouddhisme

Utilisation par le régime nazi

Conclusion et réponse à la question de départ

Un swastika gravée dans une décoration de la fête indienne de Diwali.

Préambule

Le swastika est un ancien symbole religieux datant de plus 15000 ans. De nombreux historiens pensent qu'il aurait initialement pu s’agit d'une représentation du feu et du soleil.

Cela aurait notamment pu être le cas chez certaines tribus qui peuplèrent autrefois les continents européen et asiatique.

Jusqu’au milieu du 20ᵉ et son utilisation « dévoyée » que nous connaissons tous, le swastika a longtemps été considéré comme un puissant porte-bonheur associé à des valeurs très positives comme la joie, le partage ou encore la solidarité entre les hommes.

Dans la tradition bouddhiste de l'Inde, le swastika est parfois appelé « le sceau sur le cœur du Bouddha ».

Dans les branches japonaises et chinoises de cette philosophie, il n’est pas rare d’en voir gravé sur la poitrine des statues (aussi bien anciennes que récemment construites) du Bouddha Gautama.

Toutefois, en raison de la consternation, parfois même du choc, de certains touristes occidentaux, de nombreux artistes asiatiques modernes ont choisi d'éliminer un symbole qui pourtant fait partie depuis des millénaires de leurs « 32 signes de l’être suprême ».

Le débat pour savoir si ce symbole religieux peut être restauré à sa place d'antan se poursuit sans relâche depuis plusieurs dizaines d’années.

Peintures rupestres dans une grotte du Paléolithique faites de différents symboles.

Des traces du swastika partout dans le monde

Le plus ancien exemple connu de swastika remonte à environ 15 000 ans. Découverte en Ukraine en 1908, il s’agit d’une défense de mammouth en ivoire sculptée en forme d'oiseau comprend un motif complexe composé de plusieurs croix gammées interconnectées.

Selon toute vraisemblance, cet objet aurait été utilisé au cours de rituels liés à la fertilité.

C'est en Europe de l'Est que des symboles similaires ont été utilisés pour la première fois à grande échelle par la culture de Vinca pendant la période néolithique, il y a environ 7 000 ans. Cette pratique se généralisa ensuite sur l’ensemble du continent à partir de l'âge du bronze.

Des vestiges illyriens aux pièces mésopotamiennes, en passant par des armes retrouvées dans le Nord de l’Europe : le swastika fut réellement un emblème commun à des peuples parfois très éloignés les uns des autres.

Cela soulève tout un tas de question sur la possible existence d’un « peuple-racine » ou bien, pourquoi pas, de moyens de communication plus sophistiqués que ce que l’histoire nous enseigne aujourd’hui. Nous ne creuserons pas plus loin ces deux sujets ici. Ce n’est pas le but de cet article.

Lorsque nous nous reconcentrons sur le swastika, un autre élément nous parait évident : personne ne sait pas comment ce dessin est né.

Peut-être ne s’agissait-il là que d’une forme facile à reproduire par nos ancêtres qui ne disposaient que de moyens et de techniques archaïques.

Certaines théories disent plutôt que le symbole du swastika aurait été choisi pour une certaine capacité à nous connecter à des énergies mystiques. Quoi qu’il en soit, le mystère reste aujourd’hui encore entier.

Une statue de divinité hindoue et plusieurs autres porte-bonheurs de l'Hindouisme

Les mystères de l'Orient

à travers la sagesse millénaire de l'hindouisme

Découvrir

Le swastika dans l’Hindouisme…

Malgré une utilisation quasiment mondiale, c’est réellement en Asie (et plus précisément en Inde) que le swastika a pris le sens que nous lui connaissons. Il n’est donc pas étonnant qu’il soit souvent rangé dans la catégorie des porte-bonheur hindous (dont vous pourrez d’ailleurs trouvez quelques exemples ici).

Ce symbole est l’un des 108 associées au dieu hindou Vishnu, mais est également une représentation du soleil et, à ce titre, de Surya (le dieu-soleil dans l’Hindouisme).

Selon cette interprétation, les quatre branches nous montreraient un mouvement de rotation, rappel du chemin qui suit chaque jour le Soleil. Ce serait donc ce grand mouvement d’Est en Ouest que décrirait le swastika ?

Possible. C’est en tout cas une hypothèse sérieuse qui est appuyée par de nombreux éléments.

Nous pouvons par exemple citer certaines tribus d’Amérindiens qui, elles aussi, possèdent des symboles similaires pour représenter le Soleil et sa grande course dans le ciel.

Certaines branches de l’Hindouisme apportent une interprétation quelque peu différente.

Pour ses adeptes, le swastika représenterait une dualité : si la croix tourne dans le sens horaire, elle rend hommage à Vishnu et au Soleil, si par contre elle tourne dans le sens antihoraire, c’est alors la nuit et la déesse Kali qui seraient représentées.

Deux façons d’utiliser ce porte-bonheur indien, pour deux sens distincts donc.

Le tantra (une tradition ésotérique hindouiste) fait lui aussi la part belle au swastika. Elle se retrouve notamment dans certaines théories qui s’intéressent aux chakras.

Certains yogis pensent même que la visualisation de ce type de croix indienne peut aider le méditant à atteindre plus facilement un état de transe et, in fine, à connaitre le nirvana.

Peu importe le point de vue duquel nous nous plaçons, un constat saute aux yeux : le porte-bonheur indien dont nous parlons a depuis longtemps été considéré comme un symbole de bon augure, et est utilisés dans de nombreux domaines de l’art religieux bien visibles comme l’architecture, la peinture ou encore la sculpture.

De plus, dans l'Hindouisme et le Jaïnisme, le symbole de la croix gammée est parfois utilisé pour décorer les premières pages des textes sacrés. (Qui dit texte sacré, dit que ce type symbole ne se trouve pas là par hasard…)

Certains festivals hindous ont même comme thème centrale le swastika, que l’on peut alors littéralement voir à chaque coin de rue.

En fait, le nom même de ce symbole nous indique la relation que les Indiens peuvent avoir avec. En sanskrit, swastika s’écrit « स्वस्तिक ».

La traduction phonétique, vous la connaissez déjà. La traduction littérale, elle, pourrait donner « propice au bien-être ».

À la base, il n’y avait donc aucune raison à ce que le swastika devienne l’emblème de massacres et de guerres atroces.

Peut-être est-il temps pour l’Hindouisme de faire valoir ses droits dessus, et de rappeler au reste du monde le sens premier de ce symbole qui autrefois ne représentait non la haine mais bien l’amour.

Deux statues du Bouddha et un thangka bouddhiste venu d'Asie

Les préceptes du Bouddha

par les bijoux et porte-bonheurs bouddhistes

Découvrir

…et dans le Bouddhisme

Saviez-vous que, selon toute vraisemblance, le swastika aurait dans un premier temps été utilisé par les bouddhistes pour représenter les traces de pas du Bouddha ?

Nous pouvons également retrouver ce symbole sur la couverture de nombreux textes sacrés, en particulier ceux qui présentent les sages paroles et les observations morales de Shakyamuni, plus connu sous le nom de Siddhārtha Gautama… et encore plus sous celui du Bouddha (bien que ce terme puisse désigner n’importe quelle personne qui aurait atteint l’éveil spirituel).

En tant que porte-bonheur bouddhiste, le symbole du swastika est presque toujours représenté ses branches tournant dans le sens horaire.

Cette disposition représente plus particulièrement « la fortune et le bonheur qui suivaient Bouddha et ses empreintes partout où le grand sage allait ».

De fait, nous parlons ici du premier des « 65 symboles de bon augure » associés à Siddhārtha Gautama

Certains fidèles disent même que la croix gammée contient tout l'esprit du Bouddha enfouie en elle.

Pour eux, il s’agit donc d’un élément primordial de leur foi quotidien… Nous vous laissons le drame qu’ils purent ressentir lorsqu’ils virent comment certains utilisèrent un porte-bonheur bouddhiste qui leur était si cher !

Avec la propagation de la doctrine bouddhiste en Asie, le swastika est rentré dans l'iconographie de la Chine et du Japon, où il a notamment été utilisée pour désigner la pureté, la fertilité, l'abondance, la prospérité et la longévité.

En nous présentant le swastika entouré d’idéogrammes chinois, cette bague porte-bonheur est un bon exemple du caractère universel du symbole.

En réalité, ce sont tous les pays du continent asiatique voient cette croix indienne d’un bon œil. Vous pourrez donc la retrouver dans des endroits aussi variés que dans les temples coréens, l’entrée de yourtes en Mongolie, des autels de Thaïlande, des vestiges des cultures pré-islamiques en Perse et en Mésopotamie… et la liste est encore très loin d’être complète.

Utilisé pour la confection de vêtements, gravé sur un mur ou sur le front d’une statue, ou même dessiné dans le coin d’un livre poussiéreux… Ce sont à peu près tous les temples bouddhistes du monde qui possèdent un swastika.

Comble de l’ironie lorsque nous savons le sens qu’elle a pu prendre au cours de l’histoire : des croix gammées ont même été retrouvées dans les ruines d'anciennes synagogues juives !

Scène de l'Allemagne nazi avec un tank passant entre les drapeaux.

Utilisation par le régime nazi

C’est une chose connue de tous : les nazis ont adopté la croix gammée comme emblème de leur mouvement.

Les raisons de ce choix sont en réalité nombreuses. La volonté de représenter le peuple aryen et sa supériorité sur toute autre race est sans doute celle que les historiens citent le plus souvent.

En effet, le régime nazi avait élaboré une théorie selon laquelle les Aryens, premiers habitants de l’Inde, aurait été un peuple blanc d’origine européenne.

Selon d’autres théories, le swastika aurait eu, aux yeux de hauts dignitaires allemands, un sens plus spirituel : celui d’une connexion magique avec des forces occultes mystérieuses.

Lorsque nous savons l’intérêt que pouvaient porter des hommes comme Himmler ou Rosenberg pour ce type de pratique, de nombreuses choses s'éclairent tout à coup.

Précisons en outre que, lorsqu’elle fut utilisée par les nazis, la croix gammée était presque toujours représentée tournant dans le sens antihoraire.

Site archéologique sur lequel a travaillé l’archéologue allemand Heinrich Schliemann.

Les « découvertes » d’Heinrich Schliemann

Heinrich Schliemann est un historien et archéologue allemand qui, dès le début de sa carrière, fut obsédé par la quête de la cité de Troie, ville perdue de la mythologie grecque dont nous parlent les œuvres classiques.

En 1868, il partit fouiller les pourtours de la Méditerranée à la recherche de la ville légendaire.

Plusieurs années s’étant écoulées et les découvertes se révélant décevantes, il hésitait à abandonner… jusqu’à ce qu'un archéologue britannique du nom de Frank Calvert ne lui fasse une suggestion : Schliemann ferait peut-être bien de creuser dans le mystérieux monticule d'Hisarlik sur la côte égéenne, en Turquie.

C’est là qu’au cours des années 1870, Heinrich Schliemann trouve les traces d’une civilisation vieille de plusieurs milliers d’années. Forcément, il fut convaincu qu’il s’agissait de la cité de Troie.

Toutes ses questions avaient donc trouvé réponses… Mais d’autres les avaient remplacées !

En effet, il dénombra environ 1800 exemplaires d’un mystérieux symbole dont il ne connaissait à l’époque pas grand-chose : le swastika.

Les nouvelles des fouilles sensationnelles de Schliemann se sont rapidement répandues dans le monde entier. Il ne fallut pas attendre longtemps pour que la croix gammée, elle aussi, soit de nouveau visible sur tous les continents.

En quelques années, ce motif, symbole mystérieux d’une puissance passée, charma tout un tas de personnes. Publicitaires, équipes sportives, architecture publique : dans un premier temps, le swastika était apprécié de tous et sont sens n’avait rien de spécialement négatif.

Membre d'un groupe nationaliste néo-nazi.

L’hypothèse aryenne

La découverte de Troie par Heinrich Schliemann dans les années 1870 avait de fait déclenché une série d’événements qui allaient transformer la croix gammée, symbole d’amour et d'espoir pendant des milliers d'années, en un signe autant craint que détesté du fascisme allemand.

Concrètement, ce serait l’historien Emile-Louis Burnouf qui, en lisant un texte sacré de l’Hindouisme nommé le Rigveda, affirma le premier qu’il existait un lien entre le swastika et un ancien peuple semi-légendaire qui aurait conquis l’Iran et le Nord de l’Inde : les Aryens.

En parallèle de ce phénomène, certains groupes nationalistes allemands étaient en train de développer une théorie sur leur peuple. Selon eux, ils étaient issus d’une ancienne « race » connue supérieure.

L’occasion était trop belle, et les deux théories furent jointent pour créer celle que nous connaissons.

Drapeaux du régime nazi avec leur swastika accrochés au mur d'un batiment officiel.

Et donc pourquoi avoir choisi le swastika ?

Quand Adolf Hitler a commencé son ascension au pouvoir et a cherché un symbole pour représenter son mouvement, le parti nazi et l’avenir qu’il désirait pour l'Allemagne, la croix gammée était pour lui un choix évident.

Hitler comprenait le pouvoir des images et savait que le swastika fournirait aux idéaux nazis une crédibilité historique.

C’est donc en 1920 que le chef du parti nazi, alors en plein essor, adopta officiellement la croix gammée comme symbole du mouvement.

Il ne fallut que peu de temps pour que les drapeaux du Troisième Reich, étendards rouges arborant une croix noire sur un cercle blanc, défilèrent dans l’Europe entière, répandant la guerre sur leur passage.

Statue géante du Bouddha avec un swastika gravé sur son coeur.

Conclusion et réponse à la question de départ

La croix gammée, swastika de son appellation originel, est une croix à quatre bras de longueur égale, avec les extrémités de chaque bras plié à angle droit.

Son nom vient d’un mot sanskrit signifiant fortune, chance et bien-être. Cette interprétation est clairement loin de celle qu’en fait le monde occidental au 21ème siècle.

Symbole ancien, le swastika peut en fait se retrouver dans le monde entier, bien qu’il soit particulièrement visible en Inde. Il est même correct de décrire ce symbole comme central dans la culture du pays.

Voici un article rédigé par des spécialistes qui vous fournira quelques clés de compréhension historique supplémentaire sur le sujet.

Malgré cela, la question se pose encore clairement de nos jours : « Le swastika, peut-on ignorer son sens religieux ? »

Loin de toute émotion, la question méritée d’être posée sérieusement.

De prime abord, il parait évident que les nazis et le fascisme allemand ont ternis l’image du swastika, si pas à tout jamais, au moins pour longtemps encore. Il parait compliqué de pouvoir de nos jours utilisés ce symbole pour représenter la paix et l’ouverture… en Europe tout du moins !

En effet, lorsque nous nous intéressons à l’Asie, continent que ne connut au final que peu la Seconde Guerre Mondiale, la signification que peut revêtir la croix gammée est bien différente.

Cela demandera sans doute encore beaucoup de travaillent aux adeptes de cette philosophie pour y parvenir, mais le swastika pourrait un jour de nouveau être universellement reconnu comme un porte-bonheur bouddhiste positif.

Nous pourrions même dire qu’il s’agit là d’une nécessité et d’un devoir vis-à-vis de l’humanité : s'ils ne le font pas, nous aurons définitivement cédé un symbole religieux sacré au nazisme… ce qui représenterait une défaite importante.

En soi, il est nécessaire d’éduquer le public afin que, lorsque quelqu’un voit ce type de croix dans un temple au cours de son prochain voyage à l’Est, il ne soit pas surpris et ne fasse pas l’amalgame avec l’insigne nazi.

En bonus : une vidéo qui approfondi le sujet

Porte-bonheurs présentés dans cet article :

Bague Swastika

Bague Swastika

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Pendentif de la swastika

Pendentif de la swastika

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author picture(Cyril Gendarme)

Découvrez l'auteur : Cyril Gendarme

Cyril Gendarme est un écrivain dont le site web "La Porte du Bonheur" est devenu une référence dans le domaine de l'ésotérisme. Né en Belgique, Cyril a été attiré par les mystères du monde depuis tout petit. Lorsque son intérêt pour l'occultisme a été éveillé, un sujet en particulier a ainsi capté son attention : les porte-bonheurs.

Après des années d'études et de recherches approfondies sur les traditions ésotériques du monde entier, Cyril a décidé de partager ses connaissances avec le public à travers internet. En 2019, il a lancé "La Porte du Bonheur", un site web dédié à l'exploration des porte-bonheurs, des symboles magiques et des arts ésotériques.

Le site de La Porte du Bonheur est bien plus qu'une simple vitrine pour les curieux de magie, de voyance ou de tradition. Il est le fruit de la passion de Cyril pour la recherche et la compréhension des mystères de l'univers. Chaque information disponible sur le site témoigne de son dévouement à partager ses connaissances sur les symboles les plus cachés, et leurs pouvoirs uniques.

En plus de son travail en ligne, Cyril organise régulièrement des ateliers et des conférences dans différents pays. Sa présence sur les réseaux sociaux est également très appréciée, où il offre des conseils personnalisés et répond aux questions de sa communauté avec plaisir.